Du 15/06/2024 au 22/09/2024
“Pour ce(ux) qui reste(nt)”
Exposition au prieuré Sainte Gauburge.
Les matières qui dorment dans mon atelier trouvent parfois écho avec les lieux où j’expose et dont je m’imprègne. Dans l’église de Sainte Gauburge, qui est très épurée, il n’y a plus que l’espace, au service du silence, de la méditation. La religion y est presque impalpable.
Christian Boltanski disait : « je veux qu’on rentre dans mes expositions comme on rentre dans une église ».
J’ai toujours eu une fascination pour les édifices et reliques religieux. Dans mon enfance, j’étais impressionnée que des personnes puissent garder des cheveux, des tissus, des os, de l’eau en croyant que cela pouvait avoir des pouvoirs, du fait que ceux-ci appartenaient à un saint ou une sainte. Cela me paraissait tout à fait incroyable et porteur d’imagination. Mes titres d’oeuvres sont souvent pourvus de symboles, et quand je transforme des matières par l’action de à la création je me sens parfois un peu comme une sorcière. Dans cet édifice, la lumière du chœur, proche du ciel, contraste avec l’autre partie la nef, plus sombre, dévolue autrefois aux manants pour la prière.. Cette opposition m’a intéressée pour la suite de mon travail.
Installation « Les trois linceuls du Monde »
Pour cette installation j’ai imaginé un linceul, qui, au lieu d’être pour un corps, serait pour le monde entier. Ainsi j’ai créé trois suaires qui ont comme matière première un voile d’hivernage. On met ordinairement celui-ci sur la terre endormie pour la protéger de l’hiver, en attendant sa renaissance au printemps. Ensuite j’ai dessiné des matrices, représentant des continents inventés ou suggérés, qui deviennent comme des motifs et viennent s’imprimer sur ce voile. J’ai voulu suggérer la douleur du monde, de l’humanité, actuelle et passée . J’ai tenté d’évoquer les frontières absurdes dues à des politiques et des religions qui négligent l’humain. Ces “linceuls du Monde” sont comme des peaux : l’un a été trempé dans la cire, l’autre a été piqué de poil de laine et le dernier a été brulé. Leur translucidité démontre une fragilité. Ils sont placés dans la partie sombre de l’église. Suspendus depuis la voûte jusqu’au sol, ils peuvent onduler avec l’air ou la présence du corps en mouvement du spectateur. Comme une trace vivante d’une carte sensible.
Installation « Mondes Fossiles »
Une autre matière entre en scène pour cette installation : la porcelaine. Elle a toujours été, pour moi, symbole d’ossements. Avec cette matière, j’ai moulé des parties de corps de personnes que je rencontrais. La porcelaine a été estampée dans les moules pour prendre l’empreinte.
En imaginant qu’il existait peut-être un ossuaire dans l’église, j’ai associé la porcelaine avec des « cheveux de cuivre » qui laissent une trace noire en brûlant au four.
Cette association transforme les matières en fossile. Les morceaux de corps estampés en forme de continents, les cheveux de cuivre brulés et enracinés dessinent des cartes, créent une géographie imaginaire. Ils sont positionnés sur un lit de cendre circulaire telle une mappemonde évoquant un monde fossile.
Installation « Forêt d’ossements »
L’idée est née d’une lecture d’un livre de Claude Ponti. Le personnage en quête de ses parents arrive chez une sorcière qui a, autour de sa maison, une forêt d’ossements. Elle enterrait ses victimes, et ils repoussaient en arbres d’os. Cela m’avait bouleversée. Avec de la porcelaine, durant un hiver (le temps de la mort de la nature), j’ai façonné des branches sur un fil d’acier. Je les avais ensuite tressées pour créer une forêt. Cette oeuvre se présente normalement suspendue, mais en raison de la présence de l’autel, j’ai opté pour une nouvelle disposition qui la fait apparaître comme une offrande.
L’installation « Paysage perdu », suspension en gaze d’acier inoxydable, symbolisant un vent étrange, entre eau et air, est installée au milieu des vitraux pour profiter d’une ombre portée à la chance d’un rayon de soleil, trace éphémère et impalpable.
Les « Souffles reliquaires » et les « Petites écumes » prennent vie dans les piscines, espaces qui servaient à vider l’eau bénite.
Ainsi chaque partie de l’église dialogue avec une oeuvre ou une installation, se reflète en elles dans une osmose sensible. Elles se révèlent mutuellement par des liens imperceptibles, un rapport particulier à la lumière et à l’instant.
Lundi au dimanche de 10h30 à 18h30
Prieuré de Sainte-Gauburge 61130 Saint-Cyr-la-Rosière
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